Plusieurs jurisprudences récentes nous apportent un éclairage sur les règles à suivre dans le cadre de l’acquisition de parties communes. Cette situation, qui impacte l’ensemble de la copropriété, nécessite une analyse.
De l’acquisition par vote en assemblée générale
Le mode classique d’acquisition des parties communes va nécessiter l’inscription de cette question à l’ordre du jour d’une assemblée générale. Dans un arrêt rendu le 6 avril 2023, la Cour de cassation s’est intéressée à la problématique de la participation des copropriétaires, au vote de la cession, à l’un d’eux, de parties communes spéciales. La question soulevée était celle de savoir si cette résolution, votée à la majorité de l’article 26, devait faire l’objet d’une délibération de l’ensemble des copropriétaires ou seulement de ceux de l’immeuble concerné ?
En l’espèce, la cession d’un couloir, partie commune spéciale à un bâtiment, avait été autorisée par l’AG de tous les copropriétaires. Le propriétaire d’un lot situé dans le bâtiment concerné a donc assigné le syndicat, en annulation des résolutions autorisant cette vente.
La Cour de cassation, au visa des articles 3 et 4 de la loi du 10 juillet 1965, va considérer que « seuls les propriétaires des parties communes spéciales peuvent décider de l’aliénation de celles-ci ». Elle casse l’arrêt de la Cour d’appel qui avait jugé que ce vote ne pouvait être fait que par l’ensemble des copropriétaires et qui soulignait que cette cession était accompagnée de la création d’un nouveau lot et de l’attribution d’une quote-part de parties communes, tant spéciales que générales. La Haute juridiction réaffirme une solution dégagée dans un arrêt du 1er juin 2022 à savoir que seul celui qui détient un droit de propriété sur un bien peut décider de sa vente. Les parties communes spéciales appartenant indivisément aux propriétaires du bâtiment dans lequel elles sont situées et uniquement à eux, seuls ces derniers peuvent prendre part au vote.
De l’acquisition par prescription
En vertu de l’article 2272 du code civil : « Le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ». Dans un arrêt du 15 février 2023, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur l’acquisition, par prescription, d’un WC et d’un couloir. Des copropriétaires avaient acquis un appartement dont la configuration résultait de travaux, réalisés par le vendeur, de réunion de plusieurs lots et de parties communes spéciales. Néanmoins, dans l’acte de vente, la consistance était identique à celle indiquée dans le règlement de copropriété et ne correspondait en rien à la configuration réelle des lieux. Des copropriétaires les ont donc assignés en libération forcée des parties communes occupées selon eux abusivement.
La Cour de cassation va donner gain de cause aux demandeurs. Elle constate que le couloir et les WC n’étaient pas compris dans la vente intervenue en 2010, au titre des parties privatives cédées. Concernant la prescription obtenue par le propriétaire vendeur qui avait réalisé les travaux en 1970, la Haute juridiction précise que la Cour d’appel n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée relative à la jonction des possessions. Elle en déduit que les défendeurs ne justifiaient pas, à titre personnel, d’une possession trentenaire utile. La sanction rappelée ici, de l’appropriation des parties communes sans autorisation de l’AG, est une remise en état immédiate des lieux. Ces deux arrêts mettent en évidence l’importance de faire valider ses travaux ainsi que l’acquisition des parties communes nécessaires à leur réalisation, par un vote de l’AG des copropriétaires ou des propriétaires des parties communes spéciales s’il en existe. L’aide du syndic dans la mise en place de cette acquisition s’avère essentielle afin d’accompagner les copropriétaires dans la défense de leurs intérêts.