Ces dernières années, de nouvelles activités ont vu le jour et ne cessent depuis de faire parler d’elles. La location de courte durée de type Airbnb ainsi que les Dark Stores se sont dernièrement multipliés. Les nuisances liées à ce type d’usage ont fait naître de nombreux contentieux en copropriété. Nous allons ici nous intéresser aux dernières jurisprudences et aux textes adoptés en la matière.
Quelles règles s’appliquent ?
• Les règles spécifiques à la copropriété
Chaque copropriétaire, en vertu de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, use et jouit librement des parties privatives comprises dans son lot à condition de respecter le règlement de copropriété, la destination de l’immeuble et de ne pas porter atteinte au droit des autres copropriétaires. La location d’un lot à la journée ou la semaine est qualifiée d’activité commerciale. La Cour de cassation a par conséquent reconnu que le copropriétaire qui y avait recours ne respectait pas la destination d’habitation et professionnelle de l’immeuble (Cass. 3e civ, 27 février 2020). Dans certaines copropriétés à destination mixte d’habitation et commerciale, des clauses du règlement de copropriété peuvent venir interdire l’exercice de certaines activités comme celles jugées bruyantes par exemple. La jurisprudence a validé à de nombreuses reprises ce type de clause dès lors que celles-ci peuvent être justifiées par la destination de l’immeuble. Les copropriétaires sont enfin tenus de ne pas causer de troubles anormaux de voisinage par l’usage qu’ils font de leur local. L’arrivée au milieu de la nuit de locataires bruyants qui dégradent les parties communes avec leurs valises peut donner lieu à la mise en cause de la responsabilité du copropriétaire à l’origine de ce trouble répété.
• Les règles relatives au changement d’usage
Les copropriétaires sont également tenus de respecter les dispositions de l’article L631-7 du code de la construction et de l’habitation qui qualifie de changement d’usage le fait de proposer des locations de courte durée dans des locaux à usage d’habitation. De nombreuses communes, dont Paris, subordonnent ce passage de l’habitation vers un autre usage à un régime d’autorisation. La Cour de cassation avait jugé cette réglementation et le dispositif d’autorisation de la ville de Paris, conforme au droit européen (Cass. 3e civ., 18 février 2021). Les Dark Stores se sont retrouvés récemment au cœur de l’actualité. Le Conseil d’État, dans un arrêt rendu le 23 mars 2023, précisait que ces locaux, destinés à la réception et au stockage de marchandises achetées sur internet, avant distribution, sont des entrepôts et non des commerces. Or, le PLU de Paris interdit la transformation des locaux du rez-de-chaussée en entrepôts. Le Conseil d’État a reconnu ici la validité de cette disposition et a jugé qu’une déclaration préalable de changement de destination aurait dû être déposée pour transformer ces locaux commerciaux en entrepôts. Un décret du 22 mars 2023 est venu modifier l’article R151-28 du code de l’urbanisme qui fixe la liste des destinations et sous-destinations. Les activités dites de « quick commerce » qui se développent dernièrement y sont désormais intégrées. Une sous-destination « cuisine dédiée à la vente en ligne » a été créée afin de tenir compte de la pratique des dark kitchens. Les dark stores de leur côté entrent dans la sous-destination des entrepôts.
Quelles sanctions ?
Au regard des troubles provoqués par ces activités, les juges ont prononcé diverses sanctions :
– Résiliation du bail : La cour d’appel d’Agen, dans un arrêt du 24 novembre 2021, a validé la résiliation judiciaire d’un bail du fait de la fréquence des sous-locations illégales effectuées par le locataire qui avait reçu la qualification de « super-hôte » sur le site Airbnb.
– Remboursement au bailleur des fruits de la sous-location de courte durée non autorisée : La Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 15 février 2023 a jugé, dans le cadre d’une sous-location de courte durée non autorisée, que les loyers versés par le sous-locataire au locataire principal constituent des fruits civils qui doivent être reversés au bailleur.
– Condamnation au paiement de dommages et intérêts : Le tribunal d’instance avait condamné des locataires à verser une somme de 5 000 € au bailleur au titre du préjudice moral subit par ce dernier.
– Condamnation à respecter sous astreinte la remise en état des lieux en cas de changement de destination non autorisé. L’avenir nous dira si ces sanctions auront un effet dissuasif sur l’exercice de ces activités.